About

I make installations through diverse printmaking techniques and drawing  

I’m interested in how landscapes are changing and how these changes are small and invisible.   Since 2014 I  have lived in rural France and work with the landscapes around me – I am interested in using printmaking to make meticulous detailed instillations that are both fragile and beautiful and touch on the small and invisible connections between things such as birdsong or plants and insect noise. 

I use a mixture of traditional techniques and drawing , the use of of time and echos between organic cycles and my emotional connect to a particular place. I spend time physically making the work and have chosen not to use much technology in the making of my works. These installations are about time and contact with natural spaces and I want a human connection and surface. 

Everything is in flux and fragile connected in ways that are hidden and I hope that some of my work can make visible some of this connectedness.

regularly shows in Europe  (France,Venice, Finland and Barcelona in 2015) and London with Bearspace Gallery, is a member of the London group and is in public and the private collections

Victoria Arney lives and works and runs printmaking courses in the Languedoc Roussillion area of France .

 Workshops and info

 Entretien avec Annick Denoyel 

Victoria Arney cherche à approfondir sa relation au territoire. 

Cela passe d’abord par le paysage. 

Il ne s’agit pas d’un paysage-plan que le spectateur regarderait, à distance, sur une toile de fond mais d’un paysage-espace. L’artiste est dedans, pas en dehors à le regarder, elle y est immergée et y engage toutes ses facultés perceptives, dans les trois dimensions, voire davantage car – on le verra plus tard –, si la profondeur d’une forêt est une expérience forte, celle des fonds, des racines, des confins et des élévations l’est également.

Il s’agit parallèlement d’un paysage- temps. L’artiste tente d’y capter l’instant dans toute sa richesse et comme le paysage change à tout moment, elle cherche à traduire la fluidité de ce vécu particulier qu’est marcher dans la nature et d’y progresser, dans tous les sens du terme. Le monde a quelque chose à nous apprendre. Il nous faut pour cela lui prêter attention, y engager tous nos sens et notre intelligence.

Pour ce faire, l’ouïe est le sens privilégié. L’artiste entre, ainsi, dans un paysage sonore qu’elle va essayer de traduire en image. Brises et bourrasques, murmures des ramures agitées par le vent, craquements de feuilles sous les pieds, froissements dans l’échappée furtive d’un animal, grignotages et bavardages du peuple du vivant et surtout, surtout, le chant des oiseaux

Victoria ne se contente pas d’une approche globale, elle veut faire effraction dans le réel, y cueillir des sensations fines et concrètes. Subjectivité et objectivité vont se croiser dans son travail, dans ce qu’elle veut être la traduction d’un vécu. La démarche n’est a priori ni romantique, ni écologique, ni surréaliste mais elle le devient par surcroît.

Cette approche va décider des méthodes et des techniques à utiliser : l’enregistrement et la gravure sur bois.

Victoria fait le choix d’enregistrer le chant des oiseaux. L’instant est à ce point riche qu’elle va limiter le temps d’enregistrement à une ou deux minutes, trois au maximum. À l’aide d’une application numérique, elle transforme les sons en sonagrammes, comme le fait un cardiologue au moyen d’un électrocardiogramme, sauf que c’est plus complexe. Plusieurs oiseaux peuvent chanter ou d’autres événements sonores se produire dans le même temps, de façon plus ou moins présente et diversifiée, ce qui fait que les sonagrammes obtenus en première instance sont complexes et très diffus. Leurs sorties imprimées sur le papier est plate et ne rend pas le grain du son, la gaité ou la mélancolie de l’appel. Victoria doit alors faire des choix pour mener l’interprétation graphique de ces chants. Elle peut jouer sur des paramètres numériques qui lui permettent de filtrer les sons, de leur donner de la hauteur, de la longueur, de la texture, à l’égal du musicien au moyen de sa table de mixage. Aucune expérience artistique ne peut être qu’objective. C’est ce qui se passe entre elle et les chants entendus dans l’espace qu’elle cherche à traduire. Elle fait partie de l’expérience, aussi va-telle introduire la couleur et faire bouger les échelles, tout en essayant de trouver une place entre art et science (fig).

Pour ce faire l’artiste utilise la gravure sur bois. Cette technique fait écho à la nature même de l’arbre sur lequel se perchent et nichent les oiseaux. Victoria Arney ajoute que dans les bois il y a des vibrations sonores. Le son, quand il se propage, est modulé par l’environnement qu’il traverse et par les propres vibrations de celui qui écoute. Victoria parle de la chance qu’elle a de vivre ces instants. C’est pourquoi elle veut les capturer et souhaite que cette chance se prolonge jusque dans son atelier où elle travaille. L’artiste précise également que le bois est vivant, elle doit dialoguer avec lui, elle ne gouverne pas tout ce qui se passe avec lui, il a son mot à dire. Ce matériau n’est donc pas choisi au hasard. 

Les sonagrammes retravaillés sont étirés dans le temps et transcrits, sur plusieurs plaques de bois qui rythment le tempo, comme une véritable partition musicale avec ses mesures, ses accords, ses harmoniques. Cinquante secondes de chant sont réparties en en huit mesures chacune nécessitant la gravure de quatre plaques, soit trente-deux plaques au total (fig). Chaque plaque est subdivisée en seize temps. Une méthode s’élabore. Les portées se superposent. Les oiseaux pouvant émettre deux sons en même temps ou chanter à plusieurs, en chœur, traduction, interprétation et représentation appellent l’artiste à construire une grammaire, à constituer des phrases construites avec des mots, des mots d’oiseaux bien évidemment. Et Victoria, en formidable chef d’orchestre et compositrice, organise l’écriture symphonique. Des sons mais également des silences. N’oublions pas que les phrases musicales, les mélodies, les chants polyphoniques, doivent être inversés avant d’être gravés, une fois le travail de composition fait.

Diverses installations réalisent le passage du sonore au visuel

 Puis c’est l’impression. Au sens fort d’imprimé et d’impressionné. De l’audible devient visible sur de grandes banderoles déroulées en vagues successives et diversement colorées. L’artiste veut que le spectateur lève la tête pour voir le son onduler dans l’espace (fig ). Les papiers utilisés, venus du japon, sont fins au point de se déplacer au moindre souffle d’air. Ils évoquent la gracilité, voire la fragilité, de l’instant.

Dans une autre représentation, Victoria Arney cherche à simuler la reprise des chants d’oiseaux à l’aube. Pour obtenir cet effet elle présente les impressions musicales bleues du matin devant leurs homologues tirées en une couleur fluorescente, mélange de rose vif et d’un orangé chaleureux, ce qui fait que, par transparence, on a l’impression du jour qui se lève (fig) Au bas de la gravure, bien intégré dans l’œuvre, presque caché, on peut lire un QR code qui, s’il est activé, restitue les chants du lieu où ont été enregistrés les oiseaux (fig). Art et science, une fois encore, s’essaient au dialogue.

D’autres fois, on est placé devant des lignes graphiques installées au mur, tout simplement, mais on comprend vite que, s’il s’agit d’une écriture – c’est certain, ça se voit, ça se devine –, on n’a pas les clés pour la déchiffrer. L’impression en noir sur des fonds bois parfois renvoie aux hiéroglyphes ou au contraire à une transcription musicale contemporaine ou bien encore aux échanges scripturaires d’une peuplade inconnue : celle des oiseaux. Le poète persan Farîd-al-Din’Attâr, auteur du Le Cantique des oiseaux, aurait sûrement adoré ces gravures qui peuvent rappeler par certains aspects la calligraphie arabe avec ses tracés verticaux qui s’élancent sur la page et ses lignes étirées à l’horizontale. Alors, comme le poète, à regarder le travail de Victoria Arney, pourrions-nous avoir la chance de nous laisser aller à la vision globale, de rencontrer et devenir le Simorgh, que nous formons à nous tous, oiseaux mais aussi arbres, animaux et autres enchantements vivants.

copyright Annick Denoyel